Alors ça y est ! Et toi, toujours là ?
C’est toujours comme ça.
Nous commencions à peine à nous connaître à travers quelques lettres, quelques mots envoyés pendant une année, d’ici pour là-bas avant que tout ne s’inverse un jour et tu ne me croiras sans doute plus, quand je t’écrirai de ce chez nous, te parlant sans cesse de ce là-bas, forçant le trait, d’élucubrations jamais vécues, de sentiments réécris pour se faire du bien, adoucissant les décors, édulcorant les odeurs.
Les portes du balcon se seront fermées depuis si longtemps, en ouvriront-ils d’autres un jour,… certainement.
Tu vois, je ne compte pas te laisser trop longtemps seule mais tu te l’imagines aussi bien que moi, toute les choses ont donc une fin, une conclusion, une porte qui claque, une voiture qui s’éloigne au milieu de la nuit s’enfuyant vers d’autres horizons lointains, sans un regard en arrière. Et refaire en sens inverse les derniers pas foulés il y a encore quelques heures pour un dernier trip en moto; avant de s’engouffrer sur la Highway où se surprendre sentimentalement par le vide laissé par ces souvenirs, …déjà ?
Est-ce donc là, la principale raison de vivre à cent à l’heure que de ressentir le vide parce que nous avons trop vécu et qu’il ne restera d’une vie bien trop riche d’émotions, d’amours et d’amitiés qu’il faille à l’avenir se les réserver pour des soirées au coin du feu, quand la nostalgie et la photo reviendra dans nos esprits …?
Ainsi ? C’est toujours ainsi ! Faut-il à présent terminer d’écrire le chapitre du livre pour se remémorer les passages les plus drôles, les plus sentimentaux, les plus joyeux sans avoir achevé l’acte d’écrire, sans avoir vécu la toute fin ?
Ou faudrait-il anticiper par l’approche d’un retour, la mise en ligne du mot FIN avant même de vivre le dernier chapitre ?
Attendons encore un moment, la fin de l’écriture sur le balcon n’est pas encore terminée,… elle tourne en boucle, alors, La sera-t-elle un jour ?
Drôles de questions lorsqu’une page sensible d’un voyage extraordinaire se clôt doucement. Nos témoignages, ce que nous retiendrons de ce long passage de près de six mois en Inde, arriveront sans doute plus tard, par des vidéos dans de nouveaux endroits insolites, dans de nouveaux paysages, dans de nouvelles découvertes. Sans doute qu’au gré de nos rencontres, nous pourrons vous partager toutes les richesses de ces expériences passées à Pondy et Karaikal, au Rajasthan; chaque enfant aura cœur à vous les partager ces moments forts et nous aussi, quand viendra sans doute le moment au cours de notre nouveau chapitre.
Dire au-revoir, c’est une tournée, une tournée qui comme son mot l’indique, nous fait les routes en travers, comme autant de croisements pour remercier prendre un petit moment pour chacune et chacun qui aura marqué de son empreinte notre histoire pondichérienne.
Je sais que tu détestes lire les longues listes de remerciements, comme celles que l’on fait à la fin d’un spectacle de théâtre, d’un concert, d’une commémoration, des mariages ou des funérailles… Rien de tout cela ici rassure toi, ( tu parles !); juste le temps dire à celles et ceux qui ont fait une minute, un moment, une présence pendant cette aventure, à quel point elle fut, l’aventure humaine, grâce à eux, délicieuse.
Et toi qui est si souvent curieuse, de revoir des visages qui nous collent à la peau, des petits grains de sable, de terre, et d’affection, prends-le temps, c’est le nôtre.
Quand nous sommes revenus du Rajasthan, nous avons revu une dernière fois Nancy, la danseuse française venue toutes les semaines apprendre à Maya et Eléonore les principes du Baratha Nathyam, le temps d’une révision, d’un verre dans la piscine et des adieux doux, à la porte, à cet instant, le ton du mois de mai était donné, ce ne sera plus que le décompte des jours et les embrassades fraternelles. Nancy a commencé, il nous faudra poursuivre.
Nous nous étions aussi promis de revoir Djeevan, son épouse et son grand garçon, toujours autour de la piscine pour une après-midi ensoleillée, rare moment où Jagan (lire Djeevan), se livre et s’amuse en famille avec sa femme, si indienne, si réservée aussi par la distance de la langue. Les occasions pour lui et les siens sont rares et cette après-midi là restera pour nous un instant précieux où nous pouvions nous aussi le recevoir, lui qui nous conduit depuis des années sur les routes du Tamil Nadu.
Dire aussi au-revoir à Lara et Arnaud et leurs enfants qui repartent en France et en Irlande rechercher leur fils qui continuaient sa scolarité là-bas, le temps d’un dernier repas chez eux dans leur demeure de la Rue Suffren, rencontre possible grâce à Louis-Marie, sa femme Colombe et leur petit Achille également présent, des au-revoir mais loin d’être des adieux car nous nous sommes tous promis de nous retrouver chez « nous », dans cet autre monde.
Je suis retourné personnellement remercier Stefan Mardias, directeur du Lycée Français et embrasser une dernière fois Alzina Fanovard, secrétaire de direction pour les remercier de vive-voix pour leur don des cinq ordinateurs pour le Community college avant leur départ en vacances, notre association n’est jamais loin de nous, tu ne le sais que trop bien. Et tu l’auras sans doute déjà lu dans les pages de notre site ou sur les réseaux sociaux, le succès de notre dernière semaine.
Car puisque nous en parlons de l’asbl Les Enfants de Pondy, parlons dès lors de notre escapade à Chennaï, au magasin Decathlon, tenu par Amit Chaurary, lequel nous a offert à titre de dons, du matériel de sport pour les Garçons du Shnela Illam, les Garçons des Rues à Kalapet. Nous nous sommes d’ailleurs empressés le soir même à trois jours de notre départ de remettre ces beaux cadeaux à Soeur Lissy, responsable des projets.
Et promettre à sister Lissy, et tu as vu, vous avez vu tout d’un coup quand la réalité dépasse la poésie, que le vous réapparaît !!! Donc, vous savez que nous tenterons pour l’année 2018-2019 de récolter les 3500€, en plus des 8000€ annuel de l’Association, pour rénover le toit du dortoir des Garçons des Rues, et ça, c’est un objectif de taille que nous serons en mesure de remporter
Ceci n’est possible qu’avec, vous, toi, qui nous lisez.
Et puis dans les embrassades des derniers instants de celui que nous avons le plus vu, le plus côtoyé, le colonel du dernier régiment des Indes Françaises, celui à qui aucun Sudoku ne peut résister, celui qui par une symétrie axiale et une translation d’un produit remarquable arrive à donner 34 (!) cours particuliers de 2h de Math à Noé et Maya tout au long de notre séjour pour qu’ils puissent étudier tout leur programme respectif, j’ai nommé : Pierre- Dominique Pasquet, Tu auras marqué le voyage de nos grands tant par ta gentillesse, ta façon particulière de les mettre au travail, de leur donner ces compétences dont ils ont tant besoin pour leur avenir, tant par cette personnalité si forte et si humaine. Mille merci pour eux ! Et quelle agréable et chouette dernier repas au Satsanga de notre ami Pierre que nous n’aurons hélas pas vu,… tchao, l’ami des maths !
Notre dernière semaine pondichérienne me diras-tu ?
Nous avons couru mais aussi pris ce temps important de photographier cette digue, ces lieux cultes, ces ambiances de plaine de jeux pour Auguste, lui rappelant ces instants dans son école Montessory, ces promenades dans les boutiques et les marchés, surprendre notre ami Daniel Turgot à sa partie de pétanque dans les jardins de Notre Dame-des-Anges. Daniel, que de bons moments passés chez toi, en compagnie de Marie dans ces premiers mois, à la mer, chez toi, en balades, à la piscine chez nous. Prendre le temps aussi de se retrouver et se raconter la vie,… et que de services aussi pour lesquels nous vous remercions tous les deux ! A très vite, … chez nous.
Et pour terminer ce long tour ? Je vois bien que tu te fatigues sans doute de tout connaître de ma vie, que tu espérais sans nul doute plus de poésie de charme et de sentiments, te dire que deux soirs de suite, pour finir ce beau séjour, nous avons retrouvé l’essentiel, nos amis pour festoyer l’amitié autour de la table.
L’avant-dernière ce fut avec notre plus belle coïncidence de rencontre, notre ami Gérard, directeur de l’Alliance Française et comme je sais qu’il ne lira jamais ces écrits, je peux dire ce que je pense de lui et de nos multiples rencontres : elles furent éclairantes, et belles à travers ta voix d’artiste, grave, douceureuse pour les enfants, tes gestes d’attention et d’écoute nous ont surpris tout comme cette énergie d’amitié que tu nous as tous donnée,… c’est avec regret que nous te quittons et nous espérons que Pondy saura reconnaître tout ce que tu fais pour elle. Belle route l’ami.
Tout comme nous vous la souhaitons aussi, à vous qui êtes venus en une soirée nous retrouver pour ce dernier soir à Pondy, qui avez fait ce déplacement pour s’embrasser une dernière fois. Merci les amis, Djeevan, prends soin de ma moto, Daniel, Arnaud et Louis-Marie, que votre vie soit belle !!! Mille bisous de nous six !
Voilà, Pondy c’est vraiment terminé, tu vois, j’ai beau essayé la poésie mais quand on veut simplement remercier la chaleur humaine, rien ne vaut aussi parfois les mots les plus simples, prendre le temps de les écrire ou d’y consacrer notre temps à ces rencontres, fait que notre vie à nous six est belle. Je te promets de t’écrire plus longuement, … d’ailleurs.
Nous avons embrassé une dernière fois aussi toutes les soeurs de l’hôpital de Cluny, comme nous l’avions fait à Karaikal avant que les portes elles-aussi ne se soient refermées à notre départ. Il y avait quelque chose dans l’air, quelque chose de bizarre; surtout pour nos enfants qui leur ont donné rendez-vous dans trois ans. Un manque déjà.
Il y a à Pondy une maison vide faite de bagages emplis des joies et de souvenirs
que l’instant ne peut garder,
Il y a à Pondy, une maison vide où les pièces respirent encore de présence, des cris de joie et qui hurlent à présent l’absence des enfants,
Il y a à Pondy, une maison vide, inoccupée où s’occupent des passants,
Il y a à Pondy, une maison vide, que nous avons remplie des souvenirs du présent, mais c’était … avant.
Avant de partir s’envoler vers d’autres aventures, plus loin encore : L’Indonésie et Bali !
La maison, notre maison est vide maintenant.
Nous sommes partis sous d’autres cieux,
Heureux.
à suivre…
Derniers mille bisous indiens,
Fab pour Chafab and Co